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« Le cœur a ses raisons que la
raison ignore… »
Un adage qui pourrait s’appliquer à ce conte !
En effet, un bouquetin vit seul dans la montagne, car il a un problème : son
odeur !
Une puanteur qui repousse toute compagnie !
Et pourtant, un jour, une rencontre arrive…
Sambouc le bouquetin
dessin conte pour enfants
Sambouc était un bouquetin des montagnes. Depuis tout petit, il grimpait sur
les sommets les plus escarpés, les pics les plus pointus.
Le vertige ? Il ne connaissait pas… C’était simple, il grimpait même jusqu’au
repaire de l’aigle géant, pourtant niché tout en haut d’un piton rocheux. Et
pourtant, l’emplacement n’était pas large !
Même les marmottes n’arrivaient pas à le suivre. Face aux parois, haletantes,
elles déclaraient forfait :
-« Il faudrait des crampons pour monter là, tellement c’est raide… »
-« Même les alpinistes ne parviennent pas à y monter, c’est dire si c’est
inaccessible ! »
-« Sambouc est un acrobate. Regardez-le, ça y est, il est en haut ! »
Vous l’avez compris, Sambouc était un sportif accompli, rien à dire quant à ses
exploits. Jamais, il n’avait défailli. Son problème était ailleurs. Où ? Et bien
sur lui, ou en lui, on ne savait pas …
Sambouc sentait mauvais, très mauvais… Il était impossible de l’approcher sans
ressentir de violentes nausées. L’odeur vous saisissait à la gorge, vous
retournait l’estomac, avant de vous faire tourner de l’œil. Une infection !
A cause de ce défaut, Sambouc était condamné à rester seul. Pas un animal qui ne
supportât son odeur intenable… C’était trop puant.
Ah, il avait bien essayé de la faire disparaître en se baignant à plusieurs
reprises dans le torrent glacé d’altitude. Mais rien à faire, juste un vilain
rhume à la clé.
En plus, après, ça sentait le bouquetin mouillé, ce qui décuplait l’odeur
d’origine, une horreur !
Il attendit que son pelage sèche pour entreprendre un nouveau traitement : un
bain de fleurs parfumées. Là, dans ce grand pré, il se roula des journées
entières, écrasant des milliers de pétales pour imbiber ses poils et le
parfumer.
Mais, peine perdue, autant passer une éponge sur un grand lac. L’effet était
quasi nul.
Sambouc se résigna à rester un grand sportif, seul. Tant pis, personne qui ne
soit là à l’encourager, à l’admirer dans ses ascensions. Les animaux le
contemplaient, de loin.
Un jour, il surprit une jeune chèvre, échappée de son enclos, qui l’observait.
Elle était encore loin de lui, ce fut sans doute pour cela qu’elle restait. Mais
voilà maintenant qu’elle approchait. Curieux, l’odeur ne semblait pas la gêner.
-« Bonjour » lui dit-elle, « je m’appelle Seguine. Je viens de la ferme d’en
bas. C’est super, je trouve, ce que tu fais en escalade… »
-« Tu trouves ? » répondit, faussement modeste, Sambouc, « avec un peu
d’entraînement, c’est à la portée de tout le monde. »
-« Vraiment ? » s’étonna Seguine, « même moi ? Et, pourrais-tu m’apprendre,
alors ? »
-« Mais, et la ferme ? » questionna le bouquetin.
-« Bah, j’y retournerai plus tard, un jour peut-être ! Tu sais, franchement, à
tourner toute la journée dans cet enclos, je m’y ennuie un peu… » avoua la
chèvre.
-« Bon, alors, d’accord ! » acquiesça Sambouc.
Lui qui désirait tant une compagnie, voilà qu’il en avait une, et maintenant, il
s’en trouvait tout embarrassé… Décidément, c’était compliqué d’être avec les
autres !
Il se focalisa alors sur le sport, et restreint la conversation aux seules
explications techniques. Seguine écoutait consciencieusement et progressait
rapidement.
Bientôt, elle put aller avec Sambouc sur des sommets en pointe. Quant aux
marmottes, elles y allaient de leurs commentaires :
-« Fichtre ! Sambouc a fait une émule, on dirait ! »
-« Oui, et même qu’au niveau des odeurs, c’est deux fois pire… »
-« Mais le spectacle est deux fois plus beau, regardez-les tous les deux, au
sommet de leur art ! »
Fièrement campés sur le piton rocheux, le bouquetin et la chèvre dominaient le
monde. Le peu de place là-haut les obligeait à être serrés. Leurs pelages se
touchaient, leurs odeurs se mêlaient, ils semblaient heureux…
Entre ces deux-là, c’était clair, il y avait autre chose que le sport. Sambouc
le sauvageon avait fini par ouvrir son cœur à une jolie chèvre volontaire et
déterminée. Finie la solitude.
Désormais, ils iraient à l’unisson.
Et tant pis si leurs odeurs cumulées incommodaient les habitants de la montagne.
Pour eux, une seule existait : celle de l’amour…
Créé le 1er août 2006 par Valérie Bonenfant
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