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Quand la sélection naturelle
n’opère plus…
Un couple de chenilles se reproduit dans un monde sans prédateurs. Des bébés, il
y en a par milliers ! Tellement qu’il ne peuvent plus tous tenir dans cet espace
sécurisé.
Alors, tant pis, ils vont envahir d’autres lieux, fussent-ils dangereux…
L'invasion des chenilles
dessin contes pour enfants
Il était une fois un grand pré, où curieusement ne vivait aucun animal :
nulle part un oiseau, une biche, un cafard ou un ver de terre. Rien, il n’y
avait rien, pas de vie.
Or, un jour, une petite graine de chenille, envolée par le souffle, atterrit
dans le grand pré.
Sans danger, elle put naître et prospérer, aucun prédateur ne se présentant pour
la manger.
C’était un mâle du nom de Smokeur. Il grandit seul, vécut seul et ne connut
jamais la moindre vie animale.
Or, il arriva un jour, près de la limite du grand pré nu. Smokeur se posa des
questions :
-« Que pouvait-il bien y avoir, là, de l’autre côté des grandes herbes ?
Bizarre, il entendait des bruits, des choses lui semblaient bouger…C’était
étrange ! »
Or, soudain surgit près de lui une tête ronde aux yeux cillés. C’était
Barnabette, une jeune et jolie chenille, qui le dévisageait avec un grand
sourire taquin.
-« Bonjour ! Hé bien quoi, ne fais pas cette tête-là, je ne suis pas une
extra-terrestre… Simplement une chenille, comme toi ! »
-« Heu, bonjour ! » répondit Smokeur, « vous habitez dans le coin ? »
demanda-t-il.
-« Oui, plus exactement dans le tronc creux là-bas au fond. Mais je n’ai pas le
droit de sortir à cause des oiseaux qui nous guettent pour nous manger… Et toi,
tu as le droit de te promener ainsi ? »
-« Oh oui, moi j’habite le grand pré, et il n’y a pas du tout d’animaux là-bas,
qui pourraient me manger… »
-« Mais alors, ce n’est pas dangereux ! Oh montre-moi s’il te plaît… ! »
Et ce fut ainsi que Barnabette fut amenée à connaître le grand pré et à s’y
balader en toute sécurité. C’était génial ! Elle pouvait sortir, se dorer au
soleil, sauter, courir sans risque !
Cela lui plut beaucoup, et en grandissant, Smokeur aussi. Elle lui trouva du
charme, de l’intelligence, du style.
Bref, ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants… mais vraiment beaucoup !
Toutes leurs petites graines, sans prédateur pour les croquer, grandirent et
donnèrent vie à leur tour.
Bientôt, le grand pré nu fut rempli de chenilles. Tellement qu’elles ne
pouvaient plus tenir toutes dedans. Il fallait pousser plus loin.
Des légions entières de chenilles partirent alors vers le monde vivant. Celui-ci
vit alors surgir bientôt dans ses quatre coins, des tas de chenilles et ne
savait plus gérer le flux.
Car ces chenilles continuaient à faire des petits et se reproduisaient à une
vitesse effrayante.
Elles envahissaient maintenant la forêt alentour, comme la lave des volcans en
éruption.
Les oiseaux qui en becquetaient en continu diminuaient à peine la quantité. Tous
les animaux se retrouvèrent alors pour évoquer le problème.
-« Nous n’arrivons plus à endiguer le flux de chenilles. La forêt est envahie.
Toute notre verdure est saccagée, il ne reste plus rien derrière leur passage…
Que pouvons-nous faire ? »
-« Il faudrait les repousser ! » dit un scarabée.
-« Mais comment ? Nous ne sommes pas assez nombreux ! » répondit alors le hibou
dépité.
-« Nous n’avons qu’à les empoisonner ! » proposa un castor.
-« C’est trop difficile ! il faudrait en répandre partout, et ça pourrait être
dangereux pour nous aussi ! » répondit une maman chevreuil.
-« Nous n’avons qu’à les mitrailler de flèches de bois, et les bombarder de
glands ! » suggéra alors un corbeau.
-« Mais tu ne les toucheras jamais toutes ! »
-« Moi, j’ai une idée ! » dit alors d’une toute petite voix, une araignée aux
longues pattes fines, « nous n’avons qu’à attendre le printemps et qu’elles se
changent en papillons ! »
-« Je crois que tu as raison ! Nous n’avons pas d’autres choix » dit alors le
hibou, « en plus, le printemps arrive bientôt. Attendons de voir ce que
l’arrivée de cette saison produira… »
A la fin du mois de mars, des bourgeons apparurent sur les arbres, et un beau
soleil darda chaudement ses rayons tout neufs.
Et un jour, le miracle se produisit. Dans la forêt, plus une seule chenille. A
la place, des papillons… Une multitude de papillons : des rouges, des verts, des
bleus, des jaunes.
C’était magnifique ! Chacun était différent, avec des dessins tous plus raffinés
les uns que les autres. La forêt n’était plus que tâches de couleur, irisation
et magnificence.
Tous les animaux étaient émerveillés ! Quel spectacle ! Quelle beauté ! A couper
le souffle…
Le lendemain, c’était fini. Les papillons n’avaient vécu qu’un jour et avaient
totalement disparu.
La forêt s’était réveillée comme avant, comme si rien ne s’était passé…
Même le grand pré nu était redevenu vide : pas la moindre petite graine. A moins
que là, dans un coin, peut-être…
Oui, il restait bien une graine, juste une seule, toute petite et qui naîtrait
sans doute dans quelques années.
Et devinez ce qui allait se passer dans le grand pré…
Créé le 1er trimestre 2004 par Valérie Bonenfant
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