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Un conte qui ne manque pas de
piquant…
Choupi le héron crochète dans son bec une énorme proie, que la vase du lac lui
empêche de distinguer. Pas question de la lâcher pour autant : c’est sans doute
la prise du siècle !
Tout le monde est attroupé pour voir ce qui va sortir de l’eau…
Choupi le héron
dessin conte pour enfants
Choupi le héron habitait un marais très sauvage. Il adorait pêcher et le
poisson ne manquait pas.
Un jour, alors qu’il piquait de son bec le fond boueux de l’étang, il sentit
quelque chose qui bougeait, au fond, avec force. L’eau étant très trouble, il ne
pouvait pas distinguer ce qu’il avait saisi.
Il tenta de le sortir de l’eau, coinçant l’animal dans son bec, mais il était
trop lourd et ses mouvements puissants allaient sûrement le libérer. Que faire ?
Choupi réfléchit alors quelques instants, le bec dans l’eau, le cou penché sur
ses longues pattes. La posture n’était pas facile à tenir, d’autant plus que sa
proie n’était pas vraiment coopérative et bougeait sans cesse.
Simon le castor farceur qui passait dans le coin, en profita pour lui mettre un
coup de queue sur les fesses. PAN !
-« Désolé Choupi, mais là vraiment c’était trop tentant, je n’ai pas pu me
retenir ! »
- « Grrrrh ! C’est malin ! » marmonna dans son bec Choupi , « surtout que tu as
failli me faire lâcher la proie du siècle ! Grrrrh ! »
-« La proie du siècle ? Qu’est-ce que tu tiens là dans ton bec ? » questionna
Simon.
-« Figure-toi que je ne sais pas, mais c’est sacrément gros et ça bouge… Sans
doute, un énorme poisson qui se dissimulait dans la vase ! » répondit Choupi.
-« Oh ça alors ! Est-ce que je peux t’aider à l’attraper ? » proposa le castor.
-« Oui, essaie de plonger et de m’aider à le sortir, mais attention, une fois
que tu l’as, ne le lâche plus… » dit le héron.
Simon plongea alors dans l’eau vaseuse, mais ses grands mouvements gênèrent
Choupi.
-« Arrête Simon, ça ne va pas ! Tu bouges trop, il va partir ! » cria alors le
héron.
-« Oh dommage, je l’avais presque ! » dit le castor, « j’ai même senti son
corps, vraiment très gros et très dur ! » dit le castor tout excité, en sautant
autour de Choupi.
-« Arrête voyons, avec tes sauts, tu lui fais encore plus peur ! Et il bouge
pour se sauver ! Laisse-moi donc, je m’en débrouille… »
Simon partit à contrecœur. Il décida de demander du renfort.
L’histoire fit bientôt le tour du marais, et la foule s’amassait désormais
autour de Choupi, voulant connaître la prise inespérée du héron.
Celui-ci vit venir le monde, sans pouvoir intervenir. Il aurait préféré être
seul, mais sa position pliée ne lui permettait pas vraiment de tenir les curieux
à l’écart.
Il était coincé le bec dans l’eau, entouré de conseils plus ou moins heureux.
-« Tu devrais le lâcher et le transpercer aussitôt de ton bec, comme ça après,
tu pourrais le sortir de l’eau sans résistance ! »
-« Mais non, essaie plutôt de le charmer en lui chantant un air doux et
lancinant. Il paraît que ça marche avec les serpents ! Comme ça, il sortira tout
seul de sa cachette… ! »
-« N’importe quoi ! Sers-toi plutôt de tes pattes pour le crocheter. Puis, saut
périlleux, tu le jettes en l’air et tu le rattrapes quand il retombe… »
Choupi soupirait : ces conseils étaient ridicules. Mais, d’un autre côté, seul
il n’était pas bien avancé ! Il écouta alors la proposition de Crapoti, le
crapaud bricoleur qui l’invita à réaliser une machine d’extraction du poisson.
Une planche-racloir qui allait permettre de passer sous la proie, un système de
levier pour le décoller, puis avec des jeux de poulies et des cordes, le faire
sortir de l’étang.
Bientôt, une vraie machine fantastique fut installée tout autour de Choupi et de
sa proie.
C’était maintenant prêt. La foule, haletante, attendait dans le plus grand
suspens.
Crapoti donna l’ordre de démarrer. C’était parti ! Dans un bruit de craquement,
la machine se mit en route. Choupi resserra son étreinte avec son bec : il ne
fallait pas le lâcher !
Des gros remous boueux commencèrent alors à apparaître à la surface du lac. Oh,
oh ! Il semblerait que pour l’instant, tout se déroulât comme prévu ! Oui, ça
marchait.
Maintenant, c’était les poulies qui fonctionnaient. Qu’allait-il sortir ?
Qu’allions-nous découvrir ? Le suspense était à son comble. Pas un bruit qui
n’émergeait.
Voilà, on pouvait voir maintenant la planche, et sur elle, un gros tas couvert
de boue que Choupi tenait toujours coincé dans son bec.
-« Oh ! » fit la foule.
-« Au travail ! » dit Crapoti, qui entreprit de nettoyer l’animal mystérieux.
Un grand seau d’eau, et le suspense fut levé.
Un immense éclat de rires jaillit alors de la foule.
Choupi ouvrit de grands yeux, et loucha sur sa proie qu’il tenait toujours dans
son bec.
Un morceau de bois ! Un vulgaire bout de bois ! Voilà ce que c’était ! Ah, il
avait l’air fin maintenant. Sans compter sa déconfiture quant à la perspective
du bon repas !
Choupi essaya de se donner une conduite face aux interjections dont il était
l’objet.
Et puis, finalement, il choisit lui aussi d’en rire. Quelle blague cette
histoire !
Il promit qu’on ne l’y reprendrait plus, et pêcha désormais ce qu’il pouvait, ce
qui venait, sans présager à l’avance de la taille et du poids de ses proies.
Créé le 1er trimestre 2004 par Valérie Bonenfant
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